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8ème congrès du GREPFA France, Paris (29-30 mai 2008) 1
Equipe AFT Secteur 13, CH Sainte-Anne, Paris « L’AFT - Outil de soins, outil institutionnel »
8èmes journées GREPFA Centre Hospitalier Sainte-Anne - 30 mai 2008 1
Mme Garcia,
Assistante sociale, Equipe AFT du secteur 13, CH Sainte-Anne, Paris
Mme Rideau,
Cadre supérieur de santé, Equipe AFT du secteur 13, CH Sainte-Anne, Paris
Mme le Docteur Rousset,
Equipe AFT du secteur 13, CH Sainte-Anne, Paris
Mr le Docteur Cheref,
Equipe AFT du secteur 13, CH Sainte-Anne, Paris
« L’Accueil Familial Thérapeutique
Outil de soins, outil institutionnel »
Monsieur D. est un jeune homme de 35 ans, il est le cadet de deux enfants, il vit
au domicile familial jusqu’à l’âge de 14 ans. A cet âge, suite à des mauvais
traitements de ses deux parents, il est placé en même temps que son frère en
foyer de la DDASS.
Les contacts avec les parents sont restreints et réduits à des rencontres
furtives et le plus souvent médiatisés, en particulier dans le jeune âge. Depuis
cette rupture, il est confié aux équipes éducatives de la DDASS, vit dans des
foyers pour mineurs et poursuit une scolarité décrite comme médiocre, qu’i
interrompra au cours de la 4ème.
A l’âge de 18 ans, il réintègre de nouveau le domicile familial, il est alors capable
de se défendre, il se montre parfois lui-même violent dans un climat familial non
étayant voir rejetant.
La première décompensation psychotique se produit à l’âge de 19 ans, il est
alors hospitalisé dans un service de psychiatrie à la demande d’un tiers, il est mis
sous traitement neuroleptique et au terme de son séjour hospitalier, il retourne
au domicile familial, un suivi en consultation est mis en place. Toute cette période
est émaillée de fugues et de « mises à la porte », il est alors en errance, vit
dans la rue et consomme des toxiques.
A l’âge de 22 ans, il rompt toute relation et quitte définitivement sa famille
pour être pris en charge par différentes associations et des équipes socio-
éducatives qui lui trouvent des hébergements dans différents foyers sociaux,
les départs se succèdent aux départs et aux changements de foyers.
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Ces ruptures sont pour la plus part motivées par des départs provoqués par le
patient (à distance des événements, des hypothèses de vécu délirant persécutif
sont avancées ).
Entre 1992 et 1995, Mr D. sera hospitalisé à six reprises, la symptomatologie
est dominée par des manifestations délirantes à thématique persécutive, des
angoisses dissociatives et des épisodes de violence verbale et physique avec
crise clastique, d’intolérance aux frustrations.
Dans les éléments de l’anamnèse, ces hospitalisations sont en liens avec des
mouvements de rejet familial et de l’errance qui en découle.
Nous faisons connaissance avec Mr D. en juin 2005, dans le cadre d’un suivi
spécialisé sur notre centre médico-psychologique, il se présente à la consultation
accompagné par un éducateur, il vivait alors dans un appartement géré par une
association d’aide et accompagnement à la réinsertion sociale et professionnelle.
Sa prise en charge ambulatoire est difficile, le patient ne se rend que très
irrégulièrement aux consultations, la prise de traitement prescrit reste
anecdotique.
Il se montre alors sous des traits de personnalité dyssociale, hostile et devient
rapidement agressif envers le personnel de l’association. Son discours est émaillé
d’un vécu délirant persécutif.
Dans ce contexte, une décision d’hospitalisation est prise.
Au sein du service et au-delà d’une première période faite d’opposition
systématique, le dialogue s’établit progressivement, confirmé par l’amélioration
clinique, avec la disparition des phénomènes délirants projectifs et persécutifs
et le retour à un comportement, à un contact plus cohérent et adapté.
En somme, il s’améliore rapidement dans le cadre institutionnel et s’installe dans
une organisation hospitalière stéréotypée qui le rassure. Même s’il ne critique
que partiellement son comportement, il accepte le traitement et les soins
proposés.
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Au vu de l’évolution favorable sous traitement, et en concertation avec l’équipe
socio-éducative, une sortie de l’hospitalisation est faite, avec retour à
l’appartement associatif avec suivi en consultation et dispensation du traitement.
Par ailleurs le patient est réadmis en hôpital de jour pour des activités
thérapeutiques et de réadaptation.
En décembre 2006, Mr D. est de nouveau hospitalisé dans le service au décours
d’une recrudescence anxieuse et après passage aux urgences se plaignant de
tremblements dans les jambes.
Depuis plusieurs jours, il ne se rend plus à l’hôpital de jour, il ne se lève pas le
matin, il est incurique.
La verbalisation des conflits reste certes limitée, « je préfère agir dit-il, ou
rationnalise t-il ? » mais Mr D. exprime cependant une thématique à tonalité
dépressive, ou prédomine le sentiment d’une voie sans issue et ce quelque soit
l’effort consenti.
A aucun moment, le patient n’est parvenu à accrocher un suivi au CMP, ni à
investir les activités de l’hôpital de jour.
Le patient est apathique, apragmatique augurant une évolution sur un mode
déficitaire, mais sans expression hallucinatoire, ni délirante.
L’évolution est favorable, avec levée de l’anxiété et de l’inhibition, alors que le
traitement n’est pas modifié. Cette amélioration clinique est essentiellement liée
à la prise en charge institutionnelle : entretien de soutien, prise du traitement,
des repas et éducation à l’hygiène (toilette corporelle avec bain).
Il a pu exprimer ses difficultés à vivre dans un appartement et dit ne plus
vouloir y retourner.
Il accepte et se montre rassuré par les nouvelles modalités de prise en charge
qui lui sont proposées.
Dans ce contexte, Mr D. est admis dans une clinique relais (foyer thérapeutique)
du service. Au sein de cette unité thérapeutique, la prise en charge se poursuit
sans difficultés, ni incidents, les troubles du comportement ont disparu, le
patient est compliant aux soins et se montre sensible aux sollicitations des
soignants.
Apparaissent alors des périodes de régression, le patient laisse alors la
dépendance à l’autre et à l’institution prendre toute sa place, comme seule
« stratégie » qui limiterait de nouvelles ruptures.
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Au sein de cette unité de soins, la dépendance institutionnelle du point de vue
des soignants prend tout son sens avec l’expression de ses avantages et de ses
inconvénients.
Alors qu’elle est vécue (la dépendance) par le patient comme « salvatrice » et est
exprimée non pas par un moyen verbal (les capacités d’introspection et de
l’expression émotionnelle restant encore dans la retenue chez le patient) mais
comportementale par la disparition de toute manifestation ou de vécu hostile,
par une adhésion aux soins (même si les signes d’une ambivalence sont
perceptibles) et la participation aux activités thérapeutiques.
Du point de vue soignant, cette amélioration clinique par la combinaison de
thérapeutique médicamenteuse et institutionnelle satisfait, mais, si elle
confirme : l’intensité de la pathologie psychotique, les difficultés à gérer seul le
quotidien, l’anéantissement par le vide et le besoin permanent de repères où la
dimension de l’affect est à la dimension du soin ; cette nouvelle donne interroge
par les enjeux et risques de la dépendance et la chronicisation qui viendraient
annihiler toute perspective d’un retour à une vie sociale de qualité.
Par ailleurs, aux enjeux de dépendance institutionnelle, se greffe le risque de
répétitions d’un processus où prime le vécu abandonnique et les perspectives de
nouvelles séparations génératrices d’angoisses dissociatives et de troubles du
comportement comme seule alternative à l’expression d’un mal permanent.
Comme attendu, l’évolution clinique se confirme, Mr D. se stabilise, il est
totalement intégré dans l’unité de soins, tant au niveau de la clinique relais qu’à
l’hôpital de jour.
Malgré son ambivalence, Mr D. semble avoir fait sien que la dimension « soins »
pouvait contenir une dimension protectrice, qui le mettrais à distance des enjeux
affectifs trop invasifs.
Cependant, un lieu de soins ne peut avoir comme vocation première d’être un lieu
de vie au long cours et la réflexion sur la mise en place d’un projet de soins
venant prendre le relais se faisait voir.
Au final, l’indication d’une admission en accueil familial thérapeutique s’est
imposée d’elle-même à l’équipe soignante. D’abord rejetée au vu du mot
« familial », lié à l’histoire familiale de Mr D. faite de maltraitance et de rejet
actif ; Des craintes de résurgences anxieuses et de nouvelles décompensation
avec retour à des processus pathologiques de séparation qui lui seraient imposés
par le changement du lieu de vie, d’interlocuteurs et par une « nouvelle manière »
de gérer le lien et l’affect.
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Mais, au terme « familial » est accolé le mot « thérapeutique » et cette
perspective de continuité des soins dans la mise en commun des attributs de la
famille associés aux savoirs d’une équipe soignante imposait d’elle-même cette
orientation thérapeutique.
Par ailleurs, la relation thérapeutique établie avec le patient permet d’anticiper
les possibles et éventuelles difficultés.
Mr D. est admis en AFT depuis janvier 2008. Il a repris une autonomie
étonnante, s’intégrant dans la famille nombreuse au demeurant (le couple, 2
enfants et 2 autres patients).
Après une période d’adaptation, et d’accompagnement, il a pu reprendre les
transports en commun et se rendre à ses activités dans l’unité de jour.
Son état clinique reste en relative stabilité sous traitement, il est toujours sujet
à des périodes d’angoisse, mais largement atténuées par l’expérience et la
vérification, puis de la conviction de la persistance des passerelles entre les
membres de l’AFT et l’équipe soignante.
Il se montre toujours dans l’ambivalence face à la nécessité des soins au long
cours, mais reste dans l’acceptation d’un contrat de soins.
A la croisée des chemins, face à la demande et une attente ambivalente de Mr
D., à la fois d’une prise en charge institutionnelle « totale » et d’une réticence
aux soins, l’Accueil Familial Thérapeutique s’est révélé comme seul levier
thérapeutique.
Levier thérapeutique à la reprise de l’autonomie vis-à-vis de l’institution, levier
thérapeutique dans l’acceptation des soins et levier social de par l’investissement
par le patient du lien à l’autre en tant qu’individu et dans la continuité.
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Equipe AFT du secteur 13
Mme Garcia, assistante sociale
Mme Rideau : cadre supérieur de santé
Mme le Docteur Rousset
Mr le Docteur Cheref
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